vendredi 7 octobre 2011

Que cherchait Napoleon en Egypte?

1798 : Alors qu’en Europe, la république Française (sous le régime de la directoire) luttait dans une guerre sans fin contre les coalisés, Napoléon Bonaparte, général en chef de l’armée d’Italie, s’embarqua dans une audacieuse (et folle ?) expédition pour conquérir Égypte.
On ne peut que difficilement comprendre les motivations d’une aventure aussi insensée. Car à l’époque, la France n’était pas un pays dominant en Europe. Certes la brillante compagne d’Italie a offert un petit répit à la république. Cependant, comment peut on ignorer l’hostilité des milieux conservateurs des cours Autrichien et Russe?
1798, la France est dans une paix précaire avec l’Autriche. Le traité de Campo-Formio, conséquence de la brillante compagne du général Bonaparte en Italie, n’était qu’une cession des hostilités. Il fallait vraiment être aveugle pour croire l’empire Autrichien résigné à accepter la défaite alors qu’il dispose d’un grand réservoir humain, d’une longue tradition militaire et surtout de puissants alliés. Dans ce cas, il aurait été plus judicieux de laisser l’armée sur le pied de la guerre et de se maintenir dans une attitude défensive favorisant une paix de compromis. Une telle solution était possible, même avec l’ennemi le plus acharné, mais aussi le plus éclairé: l’Angleterre.
Un tel choix peut convenir aux intérêts supérieurs de l’état et du peuple, mais il ne convient pas à celui de l’élite.
Qui est cette élite? Ce sont les « patriotes ». En clair, ce sont ces hommes de guerre robustes, cruels et rusés qui savaient que la fin de la révolution et de la guerre sera aussi la fin de leurs privilèges. Cet égoïsme a trouvé son paroxysme dans la mégalomanie inégalée de Napoléon Bonaparte. Méditons cette citation du petit caporal Corse:
« Les hommes de génie sont des météores destinés à brûler pour éclairer leur siècle. »
Pour Napoléon Bonaparte et ses généraux, il n’y-avait qu’une idée fixe: la grandeur. Ce n’est plus l’idéal révolutionnaire de liberté (car la presse et les opposants sont surveillés et réprimés par la police secrète de Fouché) ou d’égalité (car les privilèges de la noblesse d’empire seront héréditaires aboutissant ainsi à une nouvelle aristocratie). C’est plutôt cette idée ridicule mais emprunte d’idéalisme: la grandeur. Ainsi, on parlait de la « grandeur de la France », « la grandeur de l’armée », « la gloire des généraux ».
Pourquoi la compagne d’Égypte?
La compagne Égypte est à mon avis une conséquence de deux impératifs politiques plutôt que stratégiques:
Napoléon: satisfaire sa mégalomanie en ressuscitant la légende d’Alexandre le grand. Il voulait conquérir l’Egypte, le moyen orient et finir en Inde en tant qu’empereur d’Orient. Si ce plan insensé aurait réussi, je pense qu’il aurait ressuscité le mythe de César en marchant avec ses armées victorieuses pour occuper Paris! Son énergie et habileté lui donnaient l’illusion de pouvoir réaliser ce plan grandiose avec cinquante milles hommes.
Pour le gouvernement de la directoire Française: éloigner la menace d'un coup d’état de la part de ce fou mégalomane en l’envoyant à une mission impossible mais reluisante. Il était clair en effet pour tout homme sensé que la supériorité navale de la Royal Navy condamnera un tel projet à un inévitable fiasco.
Napoléon arriva en Égypte, battit les armées inférieures en expérience, encadrement, armement et technologie des Mamelouks et Ottomans à plusieurs reprises. Ses généraux furent cependant battus par les Anglais et les Ottomans, et lui même a échoué devant Acre. Napoléon a dit plus tard:
« Si je m’étais emparé d’Acre, je prenais le turban; je faisais mettre de grandes culottes à mon Armée; je ne l’exposais plus qu’à la dernière extrémité; j’en faisais un bataillon sacré, mes Immortels! C’est par des Arabes, des Grecs, des Arméniens que j’eusse achevé la guerre contre les Turcs! Au lieu d’une bataille de Moravie je gagnais une bataille de l’Issus, je me faisais empereur d’Orient, et je revenais à Paris par Constantinople ! »
Ainsi, Napoléon pensait fort naïvement que l’empire Ottoman s’écroulera comme un château de cartes après une prise éventuelle prise d’Acre. Il ne voyait pas que fort du soutien Anglais terrestre et naval, les Turcs auraient pu combattre et maintenir en échec les Français jusqu’à l’inévitable défaite. Car après Acre, il y’a Damas, Mossul, Bagdad : des cités autrement plus grandes et difficiles à approvisionner.
Bonaparte a cependant fini par comprendre la futilité de son entreprise. Il prit la fuite par la mer à bord d’une frégate avec ses plus proches officiers, en laissant l’armée Égypte à son sort. Ils finiront par capituler.

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