1798 : Alors qu’en Europe, la république Française (sous le régime de
la directoire) luttait dans une guerre sans fin contre les coalisés,
Napoléon Bonaparte, général en chef de l’armée d’Italie, s’embarqua dans
une audacieuse (et folle ?) expédition pour conquérir Égypte.
On ne peut que difficilement comprendre les motivations d’une
aventure aussi insensée. Car à l’époque, la France n’était pas un pays
dominant en Europe. Certes la brillante compagne d’Italie a offert un
petit répit à la république. Cependant, comment peut on ignorer
l’hostilité des milieux conservateurs des cours Autrichien et Russe?
1798, la France est dans une paix précaire avec l’Autriche. Le traité
de Campo-Formio, conséquence de la brillante compagne du général
Bonaparte en Italie, n’était qu’une cession des hostilités. Il fallait
vraiment être aveugle pour croire l’empire Autrichien résigné à accepter
la défaite alors qu’il dispose d’un grand réservoir humain, d’une
longue tradition militaire et surtout de puissants alliés. Dans ce cas,
il aurait été plus judicieux de laisser l’armée sur le pied de la guerre et
de se maintenir dans une attitude défensive favorisant une paix de
compromis. Une telle solution était possible, même avec l’ennemi le
plus acharné, mais aussi le plus éclairé: l’Angleterre.
Un tel choix peut convenir aux intérêts supérieurs de l’état et du peuple, mais il ne convient pas à celui de l’élite.
Qui est cette élite? Ce sont les « patriotes ». En clair, ce sont ces
hommes de guerre robustes, cruels et rusés qui savaient que la fin de
la révolution et de la guerre sera aussi la fin de leurs privilèges. Cet égoïsme a trouvé son paroxysme dans la mégalomanie inégalée de Napoléon
Bonaparte. Méditons cette citation du petit caporal Corse:
« Les hommes de génie sont des météores destinés à brûler pour éclairer leur siècle. »
Pour Napoléon Bonaparte et ses généraux, il
n’y-avait qu’une idée fixe: la grandeur. Ce n’est plus l’idéal
révolutionnaire de liberté (car la presse et les opposants sont
surveillés et réprimés par la police secrète de Fouché) ou d’égalité
(car les privilèges de la noblesse d’empire seront héréditaires
aboutissant ainsi à une nouvelle aristocratie). C’est plutôt cette idée
ridicule mais emprunte d’idéalisme: la grandeur. Ainsi, on parlait de la
« grandeur de la France », « la grandeur de l’armée », « la gloire des
généraux ».
Pourquoi la compagne d’Égypte?
La compagne Égypte est à mon avis une conséquence de deux impératifs politiques plutôt que stratégiques:
Napoléon: satisfaire sa mégalomanie en
ressuscitant la légende d’Alexandre le grand. Il voulait conquérir
l’Egypte, le moyen orient et finir en Inde en tant qu’empereur d’Orient.
Si ce plan insensé aurait réussi, je pense qu’il aurait ressuscité le
mythe de César en marchant avec ses armées victorieuses pour occuper
Paris! Son énergie et habileté lui donnaient l’illusion de pouvoir
réaliser ce plan grandiose avec cinquante milles hommes.
Pour le gouvernement de la directoire
Française: éloigner la menace d'un coup d’état de la part de ce fou mégalomane en
l’envoyant à une mission impossible mais reluisante. Il était clair en effet pour tout homme sensé que la supériorité navale de la Royal Navy condamnera un tel
projet à un inévitable fiasco.
Napoléon arriva en Égypte, battit les armées
inférieures en expérience, encadrement, armement et technologie des
Mamelouks et Ottomans à plusieurs reprises. Ses généraux furent
cependant battus par les Anglais et les Ottomans, et lui même a échoué
devant Acre. Napoléon a dit plus tard:
« Si je m’étais emparé d’Acre, je prenais le
turban; je faisais mettre de grandes culottes à mon Armée; je ne
l’exposais plus qu’à la dernière extrémité; j’en faisais un bataillon
sacré, mes Immortels! C’est par des Arabes, des Grecs, des Arméniens que
j’eusse achevé la guerre contre les Turcs! Au lieu d’une bataille de
Moravie je gagnais une bataille de l’Issus, je me faisais empereur
d’Orient, et je revenais à Paris par Constantinople ! »
Ainsi, Napoléon pensait fort naïvement que
l’empire Ottoman s’écroulera comme un château de cartes après une prise
éventuelle prise d’Acre. Il ne voyait pas que fort du soutien Anglais
terrestre et naval, les Turcs auraient pu combattre et maintenir en
échec les Français jusqu’à l’inévitable défaite. Car après Acre, il y’a
Damas, Mossul, Bagdad : des cités autrement plus grandes et difficiles à
approvisionner.
Bonaparte a cependant fini par comprendre la
futilité de son entreprise. Il prit la fuite par la mer à bord d’une
frégate avec ses plus proches officiers, en laissant l’armée Égypte à
son sort. Ils finiront par capituler.
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